APPEL À CONTRIBUTIONS : Pratiques récréatives en nature à contre-temps
Cadre général de l’appel à contribution
« Peut-on résister à l’ère du temps accéléré » s’interrogent E. Déléage et G. Sabin (2014) et peut-on repérer des expériences innovantes de décélération ? Si performance, vitesse ou rapidité ont longtemps gouverné les rapports au corps et à l’espace dans nos sociétés modernes (Ehrenberg, 1991 ; Virilio, 2004 ; Rosa, 2010), les préoccupations éthiques et environnementales contemporaines invitent à « lever le pied » : slow tourisme, slow food, slow sexe, slow urbanism, etc. Comment (re)penser les mouvements de sociétés concernant les activités corporelles, sportives et récréatives qui illustrent ce renouveau pour une culture de la lenteur (Sansot, 1998) ou « slow life ». L’accélération du temps et des rythmes quotidiens vécus est questionnée par l’émergence d’une « slow culture » (Rymarski, 2012), comme enjeu de résistance individuelle et collective ou plus simplement, permet de convoquer de manière transdisciplinaire (philosophie, sociologie, anthropologie, ethnologie, géographie, économie, urbanisme, aménagement et environnement) différents registres spatio-temporels mises à l’œuvre dans les pratiques récréatives contemporaines. Ce numéro thématique propose d’interroger les connaissances et pratiques liées à cette culture du slow, les transformations corporelles, sportives, sociales, spatiales et touristiques que la pratique du slow implique aussi. Inscrit dans un contexte où l’écologie corporelle (Andrieu, 2009) montre que l’inscription des corps dans un environnement naturel est fortement recherchée dans les pratiques en nature, la vibration ou « résonance » corporelle (Rosa, 2018) implique le plus souvent une immersion et un « être-avec » plutôt que des pratiques d’affrontement ou/et de domination. Aussi, nous employons la notion de « contretemps » car elle fait également référence à l’analyse de l’ancrage du rapport au temps dans les espaces (ou contre-espaces) pratiqués.
Axes thématiques envisagés
La revue pour son numéro thématique, invite les chercheurs issus de l’ensemble des disciplines des sciences humaines et sociales à soumettre des articles scientifiques qui interrogent les enjeux de connaissance et d’approche des temporalités récréatives, du ralentissement ou lenteur comme illustrations des contretemps (et des contre-espaces) récréatifs contemporains, notamment à partir de deux thématiques principales, non exclusives. 1) Le ralentissement ou lenteur dans les mobilités récréatives. Les propositions viseront à soulever les enjeux plus spécifiques qui sont liés aux mobilités récréatives et sportives en lien avec différents territoires (montagnards, urbains, ruraux, littoraux ou maritimes). Cet axe met l’accent sur le fait d’appréhender le « slow » dans ses mutations, transformations et résistances aux temporalités récréatives habituelles mais aussi ses paradoxes (exemple du VAE comme ouverture à des espaces inaccessibles ou autrefois accessibles dans un temps plus long). La pratique de la lenteur récréative ou sportive apparait comme un antidote aux rythmes en accélération de la vie quotidienne. L’authenticité de l’expérience vécue prime sur la rapidité expresse de certaines découvertes : itinérances récréatives, mobilités douces (vélo, pied, cheval, etc.), comportement responsable, etc. Que nous montrent ces pratiques récréatives sur le rapport au monde, sur l’habitabilité des lieux explorés et pratiqués ? Des textes seront attendus aussi sur la question des réseaux d’itinérance slow (découverte du patrimoine naturel ou en quête de spiritualité), du développement durable et des ressources ainsi mobilisées au « cœur des territoires créatifs » (Glon et Pecqueur, 2016) qu’ils soient montagnards, urbains, littoraux, maritimes ou ruraux (Marsac et al., 2012). De même, si dans le domaine juridique, la lenteur est parfois considérée comme un défaut, on pourra s’interroger sur l’encadrement juridique des pratiques « slow », notamment dans les espaces protégés terrestres et maritimes, sur les contraintes qui leurs sont opposées et sur les évolutions nécessaires du droit dans ces domaines. Sur l’autre versant des slow mobilités récréatives et sportives, il sera question cette fois, de s’interroger sur les pratiques en tant que telles. Quelles mobilités sont aujourd’hui imaginées et mises en œuvre ? Sur quels registres et avec quels supports de locomotions ? Ainsi, nous attendons des textes illustrant des activités récréatives et sportives qui mettent en pratique cette culture de la lenteur et sur différents espaces : fluvial, nautique (kayak, bateau à voile, rame, etc.), terrestre (cyclisme, motocyclisme, randonnée, trail-off), etc. 2) Le ralentissement ou lenteur comme relation corporelle et physique au monde. Les propositions viseront à questionner plus précisément les dimensions corporelles liées au slow et la manière dont le ralentissement ou lenteur sont vécus à travers la pratique physique. Le slow n’est-il pas un moyen d’entrer en « résonance » ou vibration avec l’environnement pratiqué, devenant alors le lieu d’une expérience sensible ? Comment ces modifications, appropriations et expériences venant modifier la relation entre le corps et l’environnement se concrétisent au plus profond des corps sportifs (Allen-Collinson & Leledaki, 2014) ? Le slow sport peut servir de support de réflexion dans la redéfinition des pratiques spatiales, des lieux récréatifs et des comportements individuels/collectifs. Vécue sur le mode d’une écologie corporelle, le slow sport, en se fondant dans la nature par une cosmose (Andrieu, 2017), révèle une forme de micro-écologie du bien-être et de la santé. L’objectif sera de réunir des articles qui réunissent écologie corporelle et environnement du sport pour saisir et décrire les mécanismes de ralentissement ou de la lenteur. Sont attendues des textes portant sur un très large panel d’activités récréative illustrant cette culture de la lenteur. Par exemple, quelles dimensions accordées au corps slow dans l’activité motrice ? Comment sont vécues les expériences motrices et sur quels registres corporels du slow ? Pourront être proposées des contributions portant sur les itinérances et corporéités aquatiques (telles l’apnée, le surf, le kayak, le yoga-paddle, le longe-côte, etc.), corporéités montagnardes (itinérances pédestres ou cyclistes, trail-off par étapes en marge de courses chronométrées, etc.) ou toutes autres corporéités récréatives. Les intentions de contributions (titre, résumé et bibliographie synthétique sur une page) doivent être envoyées au préalable à florian.lebreton@univ-littoral.fr avant le 01 janvier 2019
Les textes (entre 30 000 et 50 000 caractères espaces compris et bibliographie incluse) seront soumis sous format word avant le 31 mars 2019 : florian.lebreton@univ-littoral.fr